Si le franchiseur doit assister son partenaire, cet accompagnement ne doit pas être synonyme d’étouffement. Le point de vue d’Hubert Bensoussan, avocat à la cour d’appel de Paris, membre du Collège des experts de la Fédération française de la franchise.
Si la franchise française jouit d’une fort belle réussite, elle n’est plus à l’abri de la crise. Les dépôts de bilan, certes moins nombreux que dans le commerce isolé, commencent à compter. Les franchisés ont tendance alors à se prévaloir de leur dépendance au franchiseur pour mettre en cause sa responsabilité. Une brève analyse du système montre que les franchiseurs doivent modifier leur stratégie, dans l’intérêt de tous.
Un assistance trop prégnante
Assistance métier, informatique, juridique, gestion des stocks, communication et publicité, assistance dans la relation avec les autres franchisés, dans la captation de clients, etc. La multi-assistance est légion dans les réseaux, mais elle n’est pas compatible avec l’autonomie nécessaire du franchisé.
Un bel exemple dans une affaire récente jugée par la cour d’appel de Paris le 28 novembre 2012 : un franchiseur eut la courtoisie d’adresser pendant un temps un certain nombre de clients au franchisé. Toutefois, la source se tarit un jour. Le franchisé chagriné n’hésita pas à reprocher judiciairement au franchiseur cette forme d’assistance non contractuelle. Il fut évidemment débouté de sa demande, mais quelle belle leçon pour le franchiseur. Trop d’assistance ne vaut !
Et pourtant, il est fréquent que les chefs de réseau se prévalent de la faculté pour leurs franchisés de pouvoir se consacrer totalement à la vente. Ils s’occupent de tout pour lui. Reposant, certes, mais le franchisé n’est plus alors un commerçant indépendant mais un vendeur indépendant. De plus, les sur-assistés ne sont pas de grande aide pour le réseau ; ils perdent leurs facultés créatives. Ils sont dans une forme de cage sous tutelle du franchiseur. Hors de la cage, ils ne sont plus rien. Dès que le contrat se termine, ils sont condamnés à trouver un autre tuteur, et, brimés par une clause restrictive de concurrence, ils recourent au procès.
Attention à l’application du droit du travail
En toute logique, le droit réagit, parce qu’il est toujours en corrélation avec le système. Ainsi, en matière de téléphonie, applications multiples du droit du travail, grâce à l’article L.7321 du code du travail. Trois conditions cumulées peuvent engendrer son application à une relation entre un gérant de société franchisée et un franchiseur :
– un engagement d’approvisionnement exclusif ou quasi-exclusif (situation assez classique au sein des réseaux) ;
– un local fourni ou agréé par le franchiseur (l’engagement figure dans la quasi-totalité des contrats) ;
– des prix et des conditions d’exploitation imposés (la frontière entre prix conseillés et prix imposés est ténue… Quant aux conditions d’exploitation, il s’agit de l’un des fondamentaux de la franchise. Elles sont évidemment imposées par la tête de réseau).
Point n’est besoin d’avoir à rapporter la preuve d’un lien de subordination. L’application du droit du travail n’est pas rare, mais la dérive, qui n’est pas limitée à la téléphonie, peut-être facilement évitée. Il suffit de créer des facteurs d’autonomie du franchisé, en se souvenant que l’on choisit souvent d’être franchisé parce que l’on ne veut pas être salarié.
Les vecteurs d’autonomie
Les groupes de travail présentent de multiples attraits au sein du réseau. Ils donnent la température du réseau. Ils constituent une force de réflexion et de test pour l’enseigne. Les franchisés participants s’attachent beaucoup plus au réseau ; ils ont plus de respect pour le concept. On constate qu’ils sont moins dépendants et moins procéduriers.
L’association de franchisés, une solution ?
Les franchisés participants sont une aide incontestable pour le franchiseur. Ce, même s’ils se constituent en association. Créée par temps difficile, l’association peut se montrer insupportable à l’encontre du franchiseur, en favorisant les procès à son encontre. Par temps calme, avec sa personnalité morale, elle peut constituer un allié de choix pour le chef de réseau, avec des fonctions diverses. Direction de tout ou partie des commissions ; aide apportée aux franchisés dans l’application du savoir-faire ; arbitrage des litiges entre franchisés ; suggestion de décisions dans certains domaines comme le budget de communication nationale ; témoignage qu’elle peut apporter au juge, le cas échéant, sur la qualité du concept. L’association peut aussi décharger le franchiseur de certaines fonctions jugées invasives par le Droit. Elle peut constituer un instrument de rééquilibrage de la relation de franchise. Dans ce cadre, si le franchisé a pu perdre isolément une forme d’autonomie, il la retrouve au sein du groupe associatif.
La multi-assistance du franchiseur doit cesser. Sous son contrôle, les franchisés doivent mutualiser une partie des moyens leur permettant d’optimiser leur fonctionnement. C’est à ce prix que la franchise continuera profitablement son brillant parcours.
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