Les retombées économiques étaient estimées à neuf milliards d’euros pour l’Île-de-France, dont 30 % pour le secteur du tourisme, selon le comité d’organisation des JO. Si certains commerces performent, de nombreux acteurs de la restauration, de l’hôtellerie et de l’habillement déplorent des mesures de sécurité trop strictes et une communication problématique, qui ont poussé les Parisiens à déserter la ville.
« Il y a eu une communication anxiogène cet hiver », rappelle Pascal Mousset, président du GHR IDF (Groupement des Hôtelleries et Restaurations (GHR) de Paris Île-de-France) : « Les pouvoirs publics, que ce soit la Région, le ministère des Transports ou le ministère de l’Intérieur, n’ont cessé de nous dire : pendant les JO, l’important c’est de télétravailler, il vaut mieux éviter de venir à Paris, il y aura un risque de saturation des transports et des embouteillages monstres… On a constaté ensuite une baisse d’activité qui était très importante début juillet, mais qui est devenue dramatique à partir du 15 juillet. On a vu l’effet ciseau du télétravail et de la mise en place des restrictions de circulation, avec ces fameuses zones grises, rouges et bleues. Ces phénomènes ont accentué la baisse d’activité. »
Entre le 15 juillet et la cérémonie d’ouverture le 26 juillet, le GHR IDF a constaté une baisse d’activité dans les zones grises de 80 % et de 50 % dans les zones rouges. Même son de cloche pour le secteur de l’habillement, où les chiffres ont été bien en deçà de ceux d’un mois de juillet classique. « 15 jours avant la cérémonie, une chape de plomb a été posée sur le centre de Paris, alors que nous pensions que ce serait seulement 2 ou 3 jours avant la cérémonie d’ouverture, raconte Patrick Aboukrat, président de la Fédération Nationale de l’Habillement en Île-de-France. A Paris, on a eu entre -25 et -30 % de chiffre sur le mois de juillet. »
Ce dernier s’inquiète des échéances qui vont incomber aux commerçants parisiens, qui n’ont pas pu écouler leur stock pendant les soldes d’été et vont devoir acheter celui de la collection hiver. « Paris a été réquisitionné pendant les JO et nous, commerçants parisiens, subissons cette perte de chiffre. Nous sommes conscients que ce spectacle magnifique va attirer du monde à Paris, mais nous avons des échéances qui arrivent (…) Les mois de septembre, octobre et novembre risquent d’être compliqués ».
Commission d’indemnisation
Afin de répondre à ces enjeux, le Premier Ministre a mis en place une commission d’indemnisation. « Dans le cadre de l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 (JOP 2024), des situations exceptionnelles sont susceptibles de faire naître un préjudice et d’engendrer des demandes d’indemnisation », a annoncé Matignon dans un communiqué de presse.
Pour y prétendre, le gouvernement précise que le préjudice devra être « anormal et spécial et présenter un lien de causalité avec la mesure administrative ». Après les Jeux, la commission « sera saisie des demandes des intéressés et formulera des propositions d’indemnisation aux ministères compétents », conclut Matignon.
Si les demandent d’indemnisation devraient aboutir, selon Pascal Mousset, le risque est que cela prenne trop de temps. « Le timing proposé ne nous paraît pas adapté et on ne connaît pas encore le périmètre et les conditions d’accès », déplore-t-il. Le GHR demande donc, aux côtés de la Confédération des commerçants de France, la possibilité d’avoir accès au chômage partiel pour les entreprises les plus lourdement affectées, ainsi que la mise en place d’une avance de trésorerie et le report des cotisations URSAFF, « en attendant l’évaluation précise du préjudice subi par chacun », proposent-ils dans un communiqué commun.
« Nous demandons également à la Commission d’indemnisation, présidée par Madame Dominique Laurent, d’étudier très largement le cas des entreprises qui ont été affectées et de ne pas se limiter aux zones de restriction », poursuit Pascal Mousset, qui explique que « certaines entreprises ont dû fermer pour limiter les pertes, tandis que d’autres se battent et réduisent leurs charges au maximum, en proposant à des collaborateurs de partir en congés (…) Ce que l’on souhaite, c’est qu’il y ait une communication positive. Qu’on dise qu’à Paris tous les métros fonctionnent, qu’on peut y circuler en voiture, et qu’il faut y être tant que la ville est parée des couleurs de l’olympisme. On peut encore sauver la saison. »
Assouplissement des mesures de sécurité
Parmi les demandes urgentes des restaurateurs se trouve celle de la levée des barrières sur les terrasses. La mairie de Paris estime que 6% des terrasses et étalages sur les trottoirs et places de stationnement sont concernés. « On a demandé aux pouvoirs publics de pouvoir remettre au plus vite les terrasses, les mesures de restriction nous paraissent disproportionnées. On ne constate pas de saturation comme cela était annoncé, il y a eu quelques loupés dans les prévisions. »
Si la mairie n’a pas répondu à ces sollicitations, elle a indiqué qu’environ 600 bars parisiens dont les terrasses sont repliées pendant les JO seront exonérés de redevance, sur le nombre de jours concernés. « Le message que j’aimerais faire passer aux autorités, c’est qu’il faut que nous travaillions ensemble, et pas seulement pendant les JO », ajoute Patrick Aboukrat, président de la FNH d’Île-de-France.
« La profession est très fière que Paris puisse accueillir les JO. Paris, c’est aussi ses cafés, ses bistrots et ses terrasses », rappelle Pascal Mousset. « Nous sommes conscients que des mesures de sécurité étaient nécessaires pour permettre à cette grandiose cérémonie d’ouverture d’avoir lieu, mais aujourd’hui il est temps que les affaires reprennent et que les dispositifs soient relâchés. Il faut aussi communiquer sur le fait que Paris n’a jamais été aussi agréable et sûre, alors c’est le moment de venir. En plus, la météo est au rendez-vous ».