Avant de parler du plan de relance de la marque, pourriez-vous nous rappeler l’historique des négociations ?
J-C. G : Suite à la cession d’Orsay puis de Pimkie, l’AFM (Association familiale Mulliez) a décidé de dissoudre FashionCube et de redonner leur indépendance aux marques restantes (Jules, RougeGorge Lingerie, BZB et Grain de Malice). J’ai alors proposé ma candidature pour monter un projet de reprise de Grain de Malice. Plusieurs raisons m’ont d’ailleurs poussé à faire ce choix. Avant tout parce que la marque était en grande difficulté il y a 6 ans, a été retournée avec succès et affiche des profits depuis 2019. Mais aussi parce qu’elle présente un fort potentiel de croissance et de performance. Ensuite parce que Grain de Malice a bâti un modèle de développement gagnant, essentiellement basé sur le partenariat (commission -affiliation), autour d’une véritable communauté d’intérêts avec ses commerçants investisseurs. Et pour son ADN et ses collections. C’est pourquoi, et avec le soutien du Fonds FE2T d’IRD Invest, j’ai pu concrétiser ce projet en juin dernier. Nous avons également terminé l’année 2023 avec 216 magasins et un CA de 150 M €.
Quelles stratégies et offres allez-vous activer en 2024 ?
J-C. G et A.D : Les fondements sont restés les mêmes : proposer des produits à la mode, bien coupés et conçus avec des matériaux durables. Avec un soin apporté aux coupes. C’est-à-dire avoir des coupes qui, quelque soit la taille sélectionnée par la cliente, tombent bien. Question de confort, de style et d’inclusivité aussi ! Notre valeur ajoutée tient également dans le conseil client personnalisé en magasin chez nos équipes de vente. Malgré un parc qui atteint maintenant les 200 points de vente en France, nous restons une enseigne de proximité. Et si jusqu’à présent nos collections allaient de la taille 36 au 48, nous allons encore faire un pas en avant avec l’ajout de la taille 50 d’ici l’été 2024.
Nous couvrons aussi l’intégralité des besoins clients : des tenues colorées, qu’elles soient de de bureau, chics et festives ou casual pour la maison. Nous avons d’ailleurs travaillé avec Faustine Bollaert à l’occasion des fêtes fin 2023 pour mettre en avant nos collections. Et sommes en train de développer une offre d’accessoires. Il s’agit de proposer des produits textiles, de la petite maroquinerie, des bijoux et même du chaussant. Des accessoires qui sont pensés pour être assortis aux tenues que l’on vend. Mais attention : ce n’est pas une nouveauté en elle-même en linéaires ou en termes de stylisme. Ce qui change, c’est la palette des tailles!
Fidéliser par ces temps-ci, quand le pouvoir d’achat a diminué, est un vrai défi pour les retailers… Qu’en est-il de votre programme de fidélité ?
J-C. G et A.D : Le changement d’actionnaire ne change en rien le travail réalisé par l’enseigne sur la fidélité client. À voir si le programme fidélité évolue dans le temps, mais nous n’avons pas d’annonces particulières à faire sur le sujet. Il était ceci-dit payant jusqu’en 2021, mais est devenu gratuit entre-temps. Il donne accès à des promotions, des services gratuits, des sessions privatives de shopping ou encore à du coaching.
Un projet de seconde main est en cours de réflexion. Pouvez-vous nous en dire plus ?
J-C. G et A.D : Oui, une réflexion a été lancée à ce sujet, mais sa mise en œuvre ne se fera pas avant fin 2024 ou début 2025. Il y a des parties prenantes à consulter pour intégrer un schéma de circularité globale à l’enseigne. Ceci étant dit, nous avons déjà intégré des matières et des fibres recyclées à nos collections. Quant à la part du made in France, elle est encore marginale. Nous n’avons, et ce depuis deux ans seulement, que quelques références tricolores. Principalement des produits à base de maille, tels que des pulls ou des chaussettes, par exemple. Ce qui pèse un peu moins de 5 %, mais a vocation à augmenter. Nous savons aussi, en termes de positionnement prix, que notre clientèle n’est pas forcément prête à payer plus cher ses vêtements chez nous. En revanche, nous faisons aujourd’hui du proche import en Europe et autour du bassin méditerranéen (30 %).
Comment travaillez-vous l’omnicanalité aujourd’hui ?
J-C. G et A.D : Que la cliente soit en train de naviguer sur le site enseigne, ou soit présente en magasin, nous devons lui simplifier au maximum son expérience shopping. C’est ce que les retailers appellent ‘l’expérience sans coutures’. Pour cela, les clientes ont accès à l’intégralité de notre stock où qu’elles soient. Qu’il s’agisse de l’entrepôt, ou du magasin de leur choix. Côté partenaires cette fois, nous avons décidé, pour intégrer des affiliés à l’aventure, de les rémunérer sur le digital au même niveau que si cela était réalisé en magasin. La carte de fidélité est également rattachée au magasin. Ainsi, lorsqu’une cliente rattachée à un magasin réalise un achat sur notre site Internet, le partenaire perçoit le même taux de commission que si la cliente était venue en magasin.
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Quels sont les profils qui vous rejoignent ?
J-C. G et A.D : Nous rencontrons une grande hétérogénéité des profils bien que nous ayons constaté qu’il y a eu beaucoup de transformations sur l’année écoulée. Des affiliés d’autres enseignes qui ont aussi ouvert chez nous, ou qui ont fermé chez d’autres et expriment maintenant le souhait de nous rejoindre. Mais pour l’heure nous n’avons qu’un tiers de multiaffiliés sur le réseau.
Quelles sont vos ambitions en termes d’ouvertures ? Ciblez-vous des zones en particulier ?
J-C. G et A.D : Grain de Malice détient 217 boutiques, dont deux qui en ouvert en commission-affiliation en décembre dernier. Nous avons 15 à 20 ouvertures par an en commission-affiliation, puisque 60 % du réseau évolue déjà sous ce type de contrat (129 unités contre 94 en nom propre), mais restons à l’écoute des opportunités pour d’éventuelles inaugurations en succursale. C’est le cas à Mont-de-Marsan (40), par exemple. Nous visons à doubler notre part de marché en France et à atteindre les 300 magasins et près de 250 M € de chiffre d’affaires d’ici 5 ans. Même s’il y a des villes à plus fort potentiel que d’autres. Et que certaines ont la place pour une seule unité, quand d’autres peuvent en accueillir deux ou trois. Tout dépend de la densité de population.
Vous parliez de la hausse du coût du loyer en début d’échange. Intervenez-vous ou pas dans la négociation entre vos partenaires et les bailleurs ? Autrement dit, comment les accompagnez-vous dans la recherche de locaux ?
J-C. G et A.D : Nous n’intervenons pas directement dans ces négociations car il s’agirait d’ingérence. Nous nous sommes en revanche fixés un taux d’effort plafond au-delà duquel on ne passe pas le dossier du candidat en commission. Ce qui nous permet d’anticiper ses besoins et de le protéger d’un point de vue financier. Il en va de notre rôle de l’avertir sur les risques qu’il encourt. Comme de ne pas lui donner de faux espoirs en matière de développement. Nous sommes également en train de référencer Grain de Malice auprès de divers organismes bancaires afin de simplifier les conditions d’accès aux prêts des candidats qui voudraient nous rejoindre. Il s’agit d’une sorte de prospection pour faire parler de la marque. Et de faciliter l’accès au crédit du candidat. Ce qui est rassurant pour l’organisme bancaire qui choisit d’accorder le prêt. Même travail auprès des bailleurs institutionnels, auprès desquels on essaie aussi d’imprégner la marque. N’oublions pas que de nombreux territoires sont aussi en demande d’enseignes et en manque de commerces aussi. Ce qui nuit à leur économie et leur attractivité. Or, nous sommes aussi des acteurs de la réussite de ces territoires !
Quelles sont les conditions d’entrée au réseau selon les différentes typologies de formats magasins proposés ?
J-C. G et A.D : Nous demandons à nos partenaires de trouver des locaux compris entre 110 et 190 m² pour les centres-villes et sur des bassins d’au moins 40 000 habitants. Mais le local peut monter jusqu’à 190 m² de superficie en retail park. Tout en sachant que nous ne nous dirigeons pas forcément vers les grands centres commerciaux. Et que l’intégralité de la collection Grain de Malice est présente sur notre parc magasin. D’où l’importance, pour le gérant d’avoir une superficie de vente suffisante pour pouvoir tout y exposer. Nos droits d’entrée s’élèvent également à 12 000 € HT. Il faut aussi prévoir pour le coût du concept global, 900 € du m². On peut ensuite espérer atteindre les 650 000 € de chiffre d’affaires au bout de deux ans d’activité. Et le contrat d’affiliation s’étend sur 5 ans.