Dans les allées du salon dédié au commerce, qui a réuni cette année 18 000 participants sur 3 jours, un stand attire particulièrement l’attention : celui de l’entreprise française Fosfor, spécialisée dans la conception d’expériences phygitales. On y aperçoit des vendeurs et des produits à travers des écrans, comme s’il s’agissait de vitrines, ainsi que des mannequins virtuels qui essaient les vêtements à la place du client. L’entreprise s’est associée sur ce stand à La Vitre, une solution logicielle française qui permet, par exemple, à un vendeur d’apparaître dans un écran à taille humaine et de répondre aux besoins des clients.
Grâce à cette technologie, les marques ont la possibilité de proposer des services de conseil où qu’elles se trouvent, et n’ont pas à gérer le stock en magasin. « C’est une nouvelle expérience pour les clients, les équipes, les ateliers et les fournisseurs, qui peuvent imaginer, développer et créer sans nécessairement avoir à voyager d’un bout à l’autre de la planète », expliquait l’équipe de La Vitre dans un communiqué en février dernier. Cette innovation s’adresse pour le moment principalement aux marques de luxe, qui bénéficient ainsi d’une sécurité en évitant les problèmes logistiques liés au transport des produits vers les magasins. Comptez tout de même 3 590 dollars, par an et par appareil, pour bénéficier de la licence la Vitre.
« L’intelligence artificielle dans le retail est une vraie tendance, nous confirme Romain Jouve, directeur général de Fosfor, lors de Paris Retail Week. Des sociétés, comme les marqueurs LVMH ou Kering, sont pionnières dans les tendances. Et l’IA, qui permet de personnaliser l’offre en fonction de la demande du consommateur, en fait partie. » Fosfor, qui compte LVMH parmi ses clients, a déployé un outil permettant aux consommateurs de configurer leur look idéal sur un mannequin en hologramme.
Le personal shopper du futur
Reste à savoir si les consommateurs vont adopter ces nouveaux usages. Pour Romain Jouve, ces nouvelles expériences d’achat vont s’imposer d’elles-mêmes et seront adoptées d’une manière ou d’une autre par les clients. « La nouvelle génération va baigner dedans, alors que les 30-50 sont pour le moment plus frileux et moins réceptifs, estime-t-il. L’IA offre énormément de possibilités, elle permet, par exemple, de conseiller le client sur les tons, les couleurs de vêtements qui lui iraient le mieux. Et en personnalisant l’offre de cette façon, on pousse à l’achat. Dans le luxe, ils investissent des millions dans l’IA, après avoir innové dans la réalité virtuelle, qui a moins bien pris. Les consommateurs trouvaient trop invasif le fait de devoir porter un casque. »
Si l’IA permet de répondre en temps réel aux attentes des clients en magasin, elle fait également office de personal shopper virtuel dans l’e-commerce. C’est le cas, par exemple, chez Zalando, qui a lancé en 2023 un personal shopper en ligne en utilisant la technologie d’OpenAI (qui développe ChatGPT). L’outil offre des conseils personnalisés basés sur la requête client, la météo, ou encore les informations concernant la disponibilité des stocks. Dans un cas d’usage différent, la marque Stitch Fix demande à ses clients de remplir un questionnaire sur leur style vestimentaire, que l’IA va analyser avant d’envoyer ses recommandations aux stylistes de la marque. Ces derniers vont ainsi gagner du temps dans la sélection des pièces qu’ils enverront aux clients.
Selon une récente étude de la Fevad et de KPMG, les résultats sont probants : la satisfaction et la fidélité du client augmentent, et les retours ou erreurs de taille sont moins fréquents. En somme, ces nouvelles technologies pourraient permettre aux retailers de tirer leur épingle du jeu en enrichissant l’expérience globale d’achat.