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CARREFOUR CITY
« C’est une annonce historique », s’enthousiasme Maître François-Xavier Awatar, avocat spécialisé en droit des franchises qui représente une centaine de franchisés Carrefour, ainsi que l’Association des Franchisés Carrefour (AFC). « Le ministère de l’Economie a décidé d’intervenir pour demander à nos côtés la nullité des clauses, ainsi qu’une astreinte de 50 000 euros par jour et par société tant qu’ils n’auront pas modifié leurs contrats », détaille-t-il.
Cette décision fait suite à une plainte déposée par 170 franchisés de l’AFC au tribunal de commerce de Rennes en janvier dernier. « On a assigné le groupe et ses entités sur le fondement d’un article de loi appelé le ‘déséquilibre significatif entre les droits et obligations des contrats’, poursuit-il Nous allons tenter de faire juger ce déséquilibre pour obtenir la nullité des clauses qui selon nous posent un problème. »
Un contrat déséquilibré dès la signature ?
Lorsque Carrefour s’associe à un franchisé, ce dernier signe un contrat d’approvisionnement et un autre de franchise, de sept ans chacun. Cependant, le géant de la grande distribution garde au passage 26 % du capital de l’entreprise. « Si on signe un contrat de franchise avec Carrefour, on signe son arrêt de mort, résume Maître Awatar. Pourquoi ? Car le jour où vous voulez résilier votre contrat, l’entité Carrefour, qui est associée avec vous au capital, peut vous en empêcher. Le fait d’avoir un objet social sous enseigne Carrefour vous oblige à rester sous cette enseigne durant la durée de vie de la société. Et la durée de vie d’une société, c’est 99 ans. C’est ce qu’on appelle une prise d’otage. »
« Le climat s’est dégradé avec l’arrivée d’Alexandre Bompard »
Franchisé Carrefour depuis 2012, le secrétaire de l’AFC Anthony Thébaud a vu les choses changer depuis l’arrivée d’Alexandre Bompard en 2017. « L’association est née en 2020 d’un déséquilibre croissant au niveau des relations commerciales que nous avons avec Carrefour, explique-t-il. Au début, cela nous paraissait normal dans la mesure où il fallait que Carrefour soit plus dynamique. Mais les mois passant, on a constaté que nous, franchisés, étions devenus la variable d’ajustement d’un modèle qui se sert sur ses franchisés, qui vient combler tous les déficits des hypers et supermarchés et vient faire quasiment l’intégralité du résultat du groupe Carrefour au niveau national. » Anthony Thébaud dénonce également l’état d’esprit du groupe, qui « n’a plus besoin d’être compétitif puisque les franchisés sont bloqués ».
Une procédure encore longue
En ce qui concerne la demande de Bercy, qui préconise une amende record de 200 millions d’euros à l’encontre du géant de la grande distribution, le franchisé breton se dit « satisfait », mais redoute la longueur de la procédure. « Nous sommes surtout soulagés de ne pas être seuls contre Carrefour, mais nous ne sommes qu’au début d’une procédure que Carrefour veut rendre la plus longue possible », conclut Anthony Thébaud. « Je pense que cette demande de Bercy va redonner beaucoup d’espoir et un sentiment de justice », juge quant à lui François-Xavier Awatar.
Le ministère de l’Economie estime ainsi que les méthodes du géant de la distribution « consistent très concrètement à asphyxier les franchisés en usant d’une position de force ». De son côté, le distributeur « conteste vigoureusement », dans un communiqué publié mardi 18 juin, « les griefs du ministère de l’Economie relatifs à la gestion de son réseau de franchise » et dit avoir une « totale confiance » dans la « parfaite validité de ses contrats ».
Le tribunal de commerce de Rennes devrait se prononcer dans quelques mois. Les enjeux pour Carrefour sont titanesques. Son action a déjà perdu hier 9 % en quelques heures à la Bourse de Paris, avant de remonter en fin de journée.
Franchise CARREFOUR CITY
- Type Franchise
- Apport 7500
- Implantations 870