Si, en mars 2023, la Fédération Française de la Franchise indiquait, dans son étude annuelle réalisée avec la Banque Populaire*, que 34 % des Français interrogés souhaitaient créer une entreprise en 2022, dont 44 % via la franchise, la crise économique a depuis un peu rebattu les cartes. Et, parfois même, crispé ou suspendu les investissements des candidats (et de leurs banques). Une réalité qui, si elle n’effraie pas pour autant les directions d’enseignes, les incite à fidéliser leurs partenaires actuels et à revoir leur stratégie de marque employeur. Le but étant de miser sur de nouveaux leviers pour attirer.
“Les chiffres parlent d’eux-mêmes”, constatait notamment Jean-Baptiste Gouache, avocat spécialisé en droit de la distribution et associé au sein du cabinet Gouache Avocats, dans l’auditorium du Métropolitan-Chateauforrm’ City (Paris 17ème). “Parce qu’on observe une baisse significative du volume de candidats, même sur les moteurs de recherche. Soit -20 à -30 % de volume* ! Les enseignes devront donc trouver de nouveaux outils pour recruter des franchisés, additionner leurs canaux prévus à cet effet ou investir dans de la publicité ciblée pour augmenter le nombre de leads car certaines enseignes commencent, elles aussi, à réduire leurs budgets d’achats médias”.
1° Diversifier son recrutement
“En tant que recruteurs, nous devons nous adapter aux nouveaux visages des candidats qui se présentent à nous. Beaucoup de nos anciens salariés qui s’intéressent à la franchise sont d’ailleurs très jeunes”, notait ainsi Marina Charrier-Struillou, directrice déléguée au développement franchise au sein du Groupe Oui Care (Groupe O2).
Une phase de recherche qui implique aux équipes du franchiseur de non seulement investir des moyens conséquents dans une forte communication externe – via des campagnes de recrutement, des salons de la franchise sinon dédiés à l’emploi, ou par des agences d’intérim (selon le secteur d’activité) – mais aussi par le fait d’établir des partenariats.
“Il existe maintenant des techniques innovantes, ou du moins qui s’étaient peu démocratisées jusqu’à présent, par lesquelles les franchiseurs peuvent passer. Comme mandater des cabinets comptables pour trouver des profils correspondant aux critères qu’ils recherchent, ou continuer les accords avec les partenaires master franchisés pour développer tout un pôle d’unités. Autre idée : démarcher des locataires de cellules commerciales au sein des centres commerciaux”, suggérait Jean-Baptiste Gouache.
2° Choyer ses partenaires actuels
Pour Emmanuel Jury, président de Progressium, “les franchiseurs manquent d’anticipation, investissent beaucoup dans l’enseigne, mais ne se donnent pas assez les moyens pour fidéliser ». Or, c’est un enjeu essentiel tant pour maintenir son taux de renouvellement de contrats en franchise qu’un certain niveau de confiance et de reconnaissance à leur égard, surtout quand certains ont parfois vu naître l’enseigne ou assisté aux prémices de son contrat de franchise. Ou même investi dans plusieurs magasins au fil du temps. Il est ainsi important dans toute organisation de sonder ses partenaires au quotidien.
À ce sujet, la FFF indiquait d’ailleurs, qu’en 2022, 63 % des franchiseurs* favorisaient la sélection d’anciens salariés du réseau pour recruter des franchisés. L’objectif étant désormais de réaffirmer son ADN et ses valeurs d’enseigne pour trouver autant de (nouveaux) dirigeants prêts à investir dans le concept, qu’aider ces derniers à constituer leurs propres équipes, à un autre niveau hiérarchique. Notamment dans certains secteurs d’activité souffrant d’une moindre visibilité, et dont leurs avantages ne sont pas assez valorisés sur la scène publique.
De ce fait, “même si 15 à 20 % des réseaux de franchise connaissent une transformation de leurs unités existantes, via des reprises ou des cessions d’entreprises par exemple, et que l’on notait ce matin que 2/3 des enseignes enregistrent un taux de renouvellement de plus de 50 % de leurs contrats, contre 1/3 seulement pour plus de 80 % de renouvellement, les franchiseurs doivent continuer à sécuriser leurs positions. Inspirer confiance à leurs partenaires pour qu’ils reconduisent leur contrat”.
Car si le franchisé signe à nouveau, précise l’expert, “c’est positif, mais cela ne constitue en rien un acquis pour le franchiseur. Autrement, il faudra peut-être songer à lancer un système de parrainage”. Une relation humaine et commerciale dont seule la tête de réseau à le secret de pouvoir (ré)affirmer au besoin.
3° Rendre le concept plus accessible au candidat
Pour engager ses franchisés, une enseigne devra aussi s’adapter aux contraintes du marché. Et tenir compte de la hausse des coûts fonciers (pour la recherche du local), comme des moyens financiers dont disposent les porteurs de projet. “Puisqu’il est de plus en plus difficile de faire financer son projet de franchise, vis-à-vis des banques, les candidats peuvent aussi recourir à des courtiers professionnels. Ils sont d’ailleurs de plus en plus nombreux à vouloir démarrer avec l’enseigne via un contrat de location longue durée ou de location-gérance, plutôt que sous franchise directement car cela est financièrement plus aisé pour eux. Du moins au lancement, et de plus en plus sur des emplacements de centre-ville aussi”, précisait le représentant de Gouache Avocats et avocat à la cour.
Mais si ces bonnes actions inspirent, elles sont en réalité plus difficiles à adopter par les directions concernées. Notamment quand, pour Laurent Delafontaine, associé fondateur du cabinet Axe Réseaux,“la question de la reprise d’une franchise n’est pas assez abordée non plus”. Tout comme pour Emmanuel Jury, président de Progressium pour qui “l’ère du 30 % d’apport chez un candidat est révolue. Le franchiseur doit être plus flexible à l’égard du candidat sur ses conditions d’entrée!”
* 19ème édition de l’Enquête annuelle de la Franchise
*chiffres provenant des sondages effectués pendant les ateliers animés de la matinée (soit une cinquantaine d’enseignes).